samedi 9 février 2008

Ma nouvelle chambre




Au début de l'année, je me suis vue attribuer une chambre minuscule, à l'unique fenêtre encore plus minuscule, située au bord de l'autoroute. Les lecteurs les plus assidus se souviendront de ma découvenue et des souffrances à venir. J'avais demandé à changer de chambre dès les premiers jours d'octobre, mais c'est seulement lundi dernier que j'ai reçu un email de la responsable du "student housing", m'informant qu'elle avait plusieurs propositions de chambres à me faire. Le délai donne un aperçu de la crise du logement étudiant au Sarah Lawrence College, qui existe aussi sur beaucoup d'autres campus américains si j'en crois les rumeurs.
Il existe à Sarah Lawrence ce qu'on appelle les "new dorms", où les étudiants partagent de minuscules chambres à trois et n'ont pas de cuisine. L'alarme incendie se déclenche trois fois par semaine. Les demandes de changement de chambre mettent des mois à aboutir. Et l'étudiant n'a pas le droit de voir les chambres qu'on lui propose, il peut juste discuter avec ses futurs colocataires!
Je m'estime donc heureuse d'avoir découvert cette chambre aux larges fenêtres donnant sur le campus. Le voisinage est beaucoup plus calme que celui de mon ancienne demeure, et les volets beaucoup plus épais. Je dors beaucoup mieux. Elle se trouve dans une petite maison jaune que je partage avec douze Américaines. Alors qu'une femme de ménage passe apparemment plusieurs fois par semaine, il règne une grande saleté. C'est que ces demoiselles ne savent pas se servir d'une éponge. On touche ici du doigt les lacunes du système universitaire américain.
Les photos suivront.

New York Public Library


J'ai découvert que la New York Public Library posséde une très vaste collection de livres d'histoire de l'art. J'ai pu obtenir une carte car je suis élève dans une université de l'Etat de New York, c'est aussi simple que ça. Tous les livres qui m'intéressent ne circulent pas, mais grâce à sa vaste amplitude d'ouverture, je n'ai plus à me plier aux horaires ridicules de la bibliothèque du MoMA.
Je ne me rends pas dans le majestueux bâtiment neo-classique qui accueille en ce moment une exposition sur Jack Kerouac. Je vais à la Mid-Manhattan Library, qui se trouve à peine plus bas sur la Cinquième Avenue, au niveau de la quarantième rue. L'ambiance est aussi détendue que celle d'une bibliothèque de quartier qui serait particulièrement bien achalandée. Elle accueille tous les damnés de la ville, et au moment de la pause déjeuner, les jeunes cadres dynamiques de Midtown qui viennent emprunter des DVD et des guides de voyage. Au troisième étage, où se trouve le rayon histoire de l'art, plane une odeur fétide, certainement due aux seniors pas très reluisants et à leurs nombreux sacs en plastique qui ont élu domicile ici pour la journée. Qu'à cela ne tienne, je me sens beaucoup plus libre de découvrir sous leur regard l'oeuvre d'artistes aussi connus qu'Alice Aycock, alors que je serais morte de honte de demander "Fluxus for Dummies" à la noble bibliothécaire du MoMA.
Pendant que je lisais, le vieil homme en face de moi peignait de petites aquarelles. J'ai tout à coup remarqué que la fille qu'il dessinait avait le même serre-tête que moi, et que oui, il faisait mon portrait. Je ne vous raconte pas mon contentement. Après avoir ajouté vraiment trop de bleu dans mes cheveux, il s'est remis à lire. Puis, il a pris une nouvelle feuille, et a fait le portrait de ce qui s'est avéré être un lecteur mâle très décati. J'ai alors compris qu'il ne m'avait pas choisie pour la pureté de mes traits.

dimanche 3 février 2008

Quelqu'un m'a dit aujourd'hui qu'il était possible de consommer des bagels avec du strawberry cream-cheese et du granola (tout à la fois), j'ai du mal à y croire.

The Drawing Center





Le Drawing Center, organisation à but non-lucratif, a été crée en 1977, alors que certains acteurs de l'art, artistes et curateurs, cherchaient ensemble des façons de créer et d'exposer les artistes exclus du sytème marchand et institutionnel. A chacun sa cause: les artistes femmes, les artistes noirs, les artistes portoricains...Le Drawing Center embrasse un combat moins politique mais tout aussi nécessaire: encourager la création sur papier et exposer un aspect essentiel du procès de création, qui permet un rapport plus intime au travail de l'artiste que les monumentales peintures et installations.
Alors que beaucoup de lieux alternatifs ont disparu, le Drawing Center se tient toujours au 35 Wooster Street, dans SoHo. Il se divise en deux espaces qui se font face de part et d'autre de la rue. L'espace principal, au rez-de-chaussée d'un "cast-iron building", est blanc et spacieux. Il acueille pour quelques jours encore une exposition de dessins d'Alan Saret. La carrière de cet artiste américain a connu son apogée au début des années soixante-dix, alors que les grands musées et les galeries exposaient ses sculptures, abris souples de fils de fer, formes éthérés constituées de matériaux industriels et de cordes tressées, parmi les oeuvres dites post-minimalistes ou "anti-form" d'Eva Hesse, Robert Morris, Keith Sonnier. Puis, Alan Saret est parti en Inde pour trois années. La rétrospective consacrée à l'artiste à PS1 en 1990 et l'exposition du Drawing Center tentent de rattraper 25 ans d'oubli. Le Drawing Center choisit de montrer les dessins d'un artiste plus connu comme sculpteur. Mais les "gang drawings", réalisés depuis les années soixante-dix jusqu'à aujourd'hui, possèdent des affinités très fortes avec les sculptures et les projets architecturaux de l'artistes. Ce sont des formes abstraites, qui évoquent parfois quelque organisme vivant ou un projet d'autoroute, qui naissent de la répétition et de l'agrégation de traits multicolores. Le caractère incisif de chacun des traits mime la spontanéité, mais on devine pourtant beaucoup de concentration derrière chaque oeuvre. Les titres ésotériques (Inner Falls Ensoulment, 1970, par exemple) indiquent que l'artiste conçoit les formes artistiques comme l'expression d'un contenu métaphysique.
L'espace annexe est plus modeste. Y sont présentées en ce moment les collages de l'artiste berlinoise Kirstine Roepstorff. Ils mêlent des articles de journaux traitant de questions politiques à des signes de l'intime.