samedi 6 octobre 2007

Passage à Brooklyn





Depuis Coney Island, j'ai gagné le parc de Brooklyn, Prospect Park. Beaucoup plus calme que Central Park , mais même design romantique. Puis je suis allée au Brooklyn Museum en passant devant la bibliothèque de Brooklyn, très bel édifice années 30. Le musée est aussi un beau bâtiment. Tous les premiers samedi du moi, c'est la fête: expos, spectacles et concerts gratuits! Une gentille dame m'a même offert un stick à lèvres promotionnel (à quand les échantillons de déo pour animer les nocturnes du Louvre?).
J'ai vu une super expo sur l'art contemporain des Caraïbes, très critique envers l'Europe et les Etats-Unis. J'ai retrouvé des oeuvres que j'avais connu à Pompidou (notamment de Jennifer Allora, Guillermo Calzadilla - je joins un visuel de la vidéo Under Discussion - et Melvin Moti) mais présenté dans un écrin conceptuel bien plus seyant.



Ceux qui sont inquiets peuvent vérifier ici si les hot dogs ont laissé des séquelles.

Coney Island



Coney Island est situé à l'autre bout de Brooklyn par rapport à Manhattan. J'y suis allée pour y voir les fameux marchands de hot dogs et le parc d'attraction désuet vieux de dizaines d'années...et j'ai trouvé une vraie belle plage, brûlante de soleil. La mer était super appétissante mais j'avais oublié mon maillot de bain.

L'inauguration de la nouvelle présidente


Cette semaine, la routine du Sarah Lawrence College a été perturbée par les évènements liés à l'inauguration de la présidence de Karen Lawrence. Les nombreuses brochures publiées à cette occasion nous informent que Karen Lawrence est docteur en anglais spécialiste de James Joyce, diplômée de Yale et Columbia...et que son mari est un chirurgien spécialisé dans les opérations du coeur! Comme ça on sait tout.
Je n'ai pas suivi tous les spectacles et conférences programmés - ils servaient apparemment la stratégie de communication de l'université. Je suppose que toutes les personnes d'âge mur présentes dans les murs du College cette semaine étaient des donateurs potentiels qu'il fallait séduire. Jeudi soir, nous avons assisté à un concert de musique classique dont le programme était dicté par les goûts de Karen Lawrence. Beaucoup de musique américaine - Gershwin, Bernstein, Samuel Barber...c'était très agréable d'assister à un concert de cette qualité dans les murs de l'université.
Hier midi, il y avait un pic-nic "gratuit" - un email nous a informé que tous les restaurants universitaires étaient fermés et que nos Meal Plan seraient automatiquement débités. La nourriture était plutôt moins mauvaise que d'habitude, mais rien d'exceptionnel. Je retiens par exemple ces dumplings fourrés à la carotte crue. J'ai compris ensuite qu'ils étaient destinés à la large clientèle végétalienne du College.
Hier soir, il y avait un "Fall Formal" sur la pelouse sud. Evidemment au début je n'ai pas compris ce dont il s'agissait. J'ai du enquêter pour comprendre que c'était une espèce de bal où il fallait être sur son trente-et-un : costume obligatoire pour les hommes et robes pour les femmes - bien qu'un nombre non négligeable d'étudiantes se soient présentées en costard et quelques hommes minutieusement maquillés! J'ai choisi de porter ma robe noire en satin et dentelle, et je peux vous dire que j'étais parmi les plus sobres! Certaines filles avaient ressorti la robe qu'elles mettaient pour le bal du lycée, ornée de paillettes et volants cintrées à la taille puis explosant dans un jupon incroyablement bouffant.
N'étaient servis que des cocktails sans alcool en raison de la législation américaine. Résulat, tout ce jeune monde avait lourdement picolé avant de venir, ou bien sirotait à intervalles réguliers une flasque d'alcool fort cachée dans la poche intérieure de sa veste. Donc à 20h30, tous les étudiants dansaient ivres morts sur une musique live genre funk. Moi je ne me suis pas trop amusée, je me sentais complètement en dehors du coup...et trop bête d'avoir oublié mon appareil photo.
Jake, un copain, voyant que j'allais partir, a esquissé un "hug"pour me dire au revoir puis s'est confondu en excuses, expliquant qu'il avait oublié que les Français ne font pas de "hugs". J'ai dû prendre une expression sacrément outragée! Il faut que je bosse dessus.

vendredi 5 octobre 2007

Première sortie avec le groupe d'aviron

Jusqu'à présent mes entraînements d'aviron se déroulaient à l'intérieur du sport center. Nous ramions dans des "tanks", c'est à dire dans des bateaux ammarés dans des petites piscines. C'est une installation assez indescriptible. Jeudi dernier, nous sommes sortis pour la première fois. Rdv avec la "varsity" (l'équipe de ceux qui en font depuis plusieurs années) sur le parking à 6h25. Ils nous ont conduit dans des vans non loin de Mount Vernon dans un petit port de plaisance. Je suppose que ce doit être l'Hudson River mais je ne garantis rien - j'étais trop décalquée pour poser des questions. L'enjeu de la balade, pour nous les "novices", était juste de s'entraîner à sortir les bateaux. La "boat house" est une espèce de château fort assez toc, genre disneyland, où sont entreposés les bateaux de plusieurs clubs. Nous ramons sur des bateaux à quatre places, d'autres sur des bateaux à huitplaces. Je fais du "sweep rowing" (c'est à dire qu'on a une rame chacun, au contraire du "sculling" ou ils ont chacun deux rames - désolée je connais pas la terminologie française). Sortir et porter un bateau se déroule selon un ordre très précis. Le "coxswain" (une petite chose maigre sélectionnée parce que ses fesses tiennent à l'extrêmité du bateau, mais aussi parce qu'elle est capable d'être très autoritaire) donne des ordres auquels il faut absolument obéir. Le matériel et très cher donc très fragile. Nous devons hisser tous les quatre en même temps le bateau au-dessus de nos têtes avant de le poser sur nos épaules, deux rameurs d'un côté du bateau, deux de l'autre. Pour moi, cet exercice a été d'une grande pénibilité. Le bateau est extrêmement lourd. Apparemment (d'après Chloé qui m'observait) nous étions mal réparties et j'étais la seule à supporter l'arrière du bateau. En plus, aussi étonnant que cela puisse vous paraître, j'étais la plus grande des quatre! Donc sans doute je portais davantage que les autres. Je n'avais jamais rien porté d'aussi lourd et j'étais prête à disparaître anéantie sous le bateau d'un instant à l'autre. Je pleurais presque de douleur. J'ai pensé abandonner l'aviron quand j'ai réalisé que la condition sine qua non pour ramer était d'être capable de porter son bateau jusqu'à l'eau! Comme dit la coach, l'aviron est un sport exigeant: il faut être "super fit", avoir une "good technique", et en plus respecter ses "teammates" et le matériel! J'ai décidé de forcer un peu sur la muscu des bras.

mercredi 3 octobre 2007

Mes cours

Chaque étudiant du Sarah Lawrence College s'inscrit à trois cours. En plus des heures de cours, il doit suivre des "conferences". Ce sont en fait des travaux dirigés individualisés. J'ai choisi de ne m'inscrire qu'à deux cours pour avoir le temps de faire ma thèse (hum) et de d'enseigner le français. Je suis d'office dispensée de faire les devoirs et de m'inscrire au "conference works" car je n'ai que le statut d'auditrice. Dans le deal initial, il était inscrit que je pouvais suivre tous les cours que je désirais. La réalité est beaucoup plus nuancée car les principes pédagogiques du Sarah Lawrence n'autorisent que quinze élèves par classe. Heureusement, je suis parvenue à mes fins. Le cours d'histoire de l'architecture depuis 1945 est une "lecture", c'est à dire qu'il se passe en amphi. Le cours de "Narrative Structural Analysis" en cinéma était très convoité mais le prof a senti que c'était une courtoisie de collègue à collègue qu'il me devait. Il m'a donc donné le poste de Teaching Assistant pour ses cours, afin que je puisse y assister sans susciter l'aigreur des autres étudiants. Je suis payée pour lui faire quelques photocopies ou lui chercher des DVD à la bibliothèque. Je ne fais vraiment rien, et d'ailleurs il ne m'a toujours pas fait remplir les formulaires relatifs au job! Donc pas de paye en vue.
Je suis vraiment très surprise par la façon dont les cours se déroulent. Je ne comprends pas exactement tout ce que dit le prof d'histoire de l'art, qui a un très fort accent new yorkais. Je ne suis donc pas exactement bien placée pour juger. Mais il me semble que son discours n'est pas très méthodique malgré tous ses power points. Les élèves l'interrompent par un "Hey Joe" - dans mon fort intérieur il sera éternellement Mr Joseph Forte. Ce qui me choque terriblement, c'est qu'alors que le cours ne dure qu'1h30, 10 élèves de dix-huit ans et plus éprouvent le besoin de faire une pause pipi. D'autres vont acheter des chips. D'autres encore sont complètement avachis dans leur siège, les pieds sur la rangée devant eux. Je crois que c'est la mentalité "client" , conséquente des frais d'inscription.
Quant au cours de cinéma, je suis un peu déçue. Après l'ouverture du cours durant laquelle le prof nous explique que tout scénario repose sur un "conflit" puis pose quelques questions pour obtenir diverses définitions du "conflit" plus approximatives les unes que les autres, tout le monde se lance dans une discussion échevelée sur des films bien mais sans plus - American Beauty, Adaptation, Erin Brokovitch... Le prof les appelles les "lawn-mower films". Je n'ai pas la culture du lawnmower film. Je ne peux donc pas participer au concours de "qui gueulera le plus fort pour exposer en 25 minutes son avis sur le film du genre: Moi je pense que le père est un passif-agressif méchant et que la mère est gentille et que le fils est méchant..." le tout avec force "kind of", "like" à la sauce américaine.
Je pense à Todorov, je pense à Bellour, je pense à Hitchcock (en français), et je ne comprends pas pourquoi tous sont bannis...risqueraient-ils d'inhiber la pensée de ces jeunes gens extravertis? L'objectif des cours au Sarah Lawrence semble d'entraîner les élèves à combattre oralement, non pas à force d'arguments mais plutôt à force de suffisance. Ici sont éduqués des dominants qui même à l'université ne connaîtront pas le doute.

"French tutoring sessions"

Pour ceux qui n'auraient pas compris les tenants et les aboutissants de ma présence au Sarah Lawrence College, sachez que j'y suis en tant qu''étudiante de la Sorbonne en échange et assistante de français. Ce statut mixte m'exonère des "tuition fees" (qui s''élèvent à 37,3 M $ ), des frais de logements, de bouche (2 M $ supplémentaires je crois bien) et me donne 300 $ d'argent de poche par mois. Je ne suis pas sûre que le deal soit à mon avantage. Les assistantes de français sont les seules à posséder ce statut particulier. Les assistants d'italien, d'allemand, de russe, etc. travaillent à plein temps et sont plus âgés que moi. Je suis dépendante de la French Faculty (les professeurs de français). Elle s'intéresse peu à la façon dont je travaille avec les étudiants mais attend que je lui rende des comptes sur leur assiduité.
J'ai organisé moi même mes horaires, étant tenue d'enseigner 6h par semaine. Mais chaque jour, je reçois un mail d'un étudiant qui me demande de changer d'horaire, tant est si bien que je ne vais plus donner que 5 h. J'ai découvert la difficulté de jongler avec des emplois du temps tous différents et tous inconnus. En plus de leurs cours, certains ont des obligations mystérieuses qui les empêchent de venir de 6 à 7h mais pas de 7h10 à 7h42.
Les étudiants sont à peu près quatre par cours mais beaucoup sèchent et m'envoient un mail pour expliquer qu'ils ont une "personal emergency", ou qu'ils sentent qu'ils vont tomber malade s'ils viennent. D'autres encore ne réapparaissent jamais et attendent qu'un camarade annonce pour eux qu'ils ont lâché le français. Tout ça me donne l'impression d'être prise dans un jeu de chaises musicales et j'ai complètement abandonné l'idée de noter qui est présent et absent.
J'étais missionnée pour faire de la "conversation" avec les élèves mais tous sont débutants. L'heure se partage donc entre révision (ou apprentissage) du présent du verbe être, de la distinction entre article indéfini et défini (l'occasion pour moi de réinventer la grammaire française) et des activités un peu plus culturelles. Je leur ai par exemple proposé de travailler sur la recette du kougelhopf. Certains se sont pris au jeu et ont adoré découvrir les bribes d'histoire de l'Alsace que je pouvais leur apprendre, la signification de "pétrir" et "levure de bière". Paris de nuit de Brassaï, que je voulais utiliser pour leur faire apprendre du vocabulaire ("prostituée", very useful) a été un fiasco total. J'ai essayé hier de les faire réagir sur Voici, à partir du constat que les lecteurs français sont essentiellement intéressés par le devenir de stars américaines...ils ont juste trouvé ça "dégoûtant" ou "amusant" mais ils n'avaient pas l'envie ou les moyens linguistiques d'en faire une critique un peu plus élaborée.
J'ai donc déjà des chouchous et des bêtes noires: ceux qui réagissent et font avancer le cours versus ceux qui baillent. Tout ça pour dire, si vous avez la moindre idée de supports de cours basiques, permettant d'aborder un point de grammaire ou un point de vocabulaire, je suis preneuse!

dimanche 30 septembre 2007




Juste pour vous donner un aperçu de l'élégance du bâtiment et de l'animation de la 5th Avenue, même un dimanche!

MoMA, again




Clotilde et moi avons vu une très belle exposition au MoMA, Repicturing the Past / Picturing the present. Y sont présentées des gravures et lithographies d'artistes modernes et contemporains qui offrent une relecture de thèmes classiques: tentation de Saint Antoine par Odilon Redon et K.O.S. (Kids of Survival), Sainte Sébastienne par Louise Bourgeois, faunes et minotaures par Picasso...On a enchaîné avec l'accrochage des collections permanentes au deuxième étage. De très belles choses, notamment d'artistes américains qu'on voit peu en France comme Sam Francis, Joan Mitchell, Eva Hesse...
Mais l'audioguide, l'audioguide!! Quand les commentaires sont disponibles en français, le niveau est à peu près correct. C'est à dire qu'une voix grave de comédien à la ramasse décrit méthodiquement les "étagères" de Donald Judd sans nous éclairer sur le mystère de l'oeuvre. Mais Clotilde et moi avont été complètement atterrées par la débilitude ketchupisée des commentaires destinés aux visiteurs anglophones. Par exemple, quand on tape innocemment 412 pour entendre l'analyse de la peinture OOF d'Edward Ruscha, on se fait étourdir par une musique dance puis par des voix de lycéens qui nous expliquent qu'ils ont interrogé les visiteurs du Moma pour savoir pourquoi ils aimaient bien le mot "oof"... Ca concurrence grave l'audioguide Da Vinci Code du Louvre dans le genre visite ludique.

Messe à Harlem


Dimanche matin, j'ai suivi Clotilde, sa soeur Béatrice et son amie Claire à une messe à Harlem. Il y a plusieurs églises dans le quartier et Clot en avait déjà testé pas mal. Certaines, recommandées par le Lonely Planet, sont assaillies par les touristes, paraît-il. Malgré cela, lorsque nous arrivons, les "paroissiens" nous acueillent gentiment et nous guident vers le fond de l'église où sont déjà installés plusieurs touristes. Eux comme nous, nous détonnons parce que nous sommes blancs et mal fringués. Tous les habitués sont extrêmements élégants, tailleurs pour les femmes comme pour les hommes. Les enfants sont apprêtés comme pour une première communion. Je repère un groupe de femmes vêtues de noir avec un chapeau blanc, et un groupe de femmes en jupes rouges et chapeaux rouges, sans pouvoir expliquer la signification de ce costume. Un choeur d'hommes se tient près de l'hôtel. Le chef d'orchestre a un chignon, des boucles d'oreille et le rythme dans la peau! Nous profitons alors d'un vrai concert de gospel, rythmé, puissant, joyeux. On se lève, on s'assoit, on frappe dans ses mains au gré des recommandations de nos voisines, vieilles dames attentives. Tout au long des services, qui se suivent sans discontinuer de 10 h à 13 h (?), les gens vont et viennent. L'ambiance est beaucoup plus décontractée que durant un office français. Très peu de moments de prêche, aucun temps de recueillement - la prière se fait en chantant.

Chelsea, Galeries



On est ensuite parties à la conquête des galeries de Chelsea. De façon globale, on peut souligner à quel point les galeries new-yorkaises sont plus spacieuses que les parisiennes. Gagosian, sur la 21st, est vaste comme un musée! Les de Kooning se reflétaient sur le sol de béton ciré aussi spendidement que des nymphéas sur l'étang de Giverny. Les galeries alternent valeurs sûres - Robert Morris, Sol Le Witt, Candida Höfer - avant-gardes françaises (l'intérêt du travail de Bismuth reste un mystère, à Chelsea comme à Paris), croûtes fluos (je ne pousse même pas la porte) et travaux plus nouveaux et plus fins comme les animations numériques d'une artiste coréenne dont j'ai oublié le nom. À la NY Art Book Fair, j'ai récupéré des affiches qui seront du plus bel effet dans mon salon ... et j'ai localisé Paul-Armand Gette dans un exemplaire très rare du catalogue de Fluxshoe, expo itinérante de 1972!

Samedi, Chelsea













Ma vie a changé depuis que j'ai retrouvé Clotilde à New York. J'ai enfin une partenaire de choix pour découvrir la ville et me divertir, comme pour affronter les situations anxiogènes (= acheter un cell phone: ça y est, c'est fait!). Samedi, nous avons fait un petit itinéraire dans Chelsea. Nous avons d'abord déjeuné au Chelsea Market, qui abrite des épiceries, des marchands de citrouille, des semi-restos pour casser la croûte et un vendeur de tapis marocains (!!). Chez Lobster Place, ils vendent des barquettes de sushis d'une fraîcheur et d'une saveur étonnantes, pour pas cher du tout. On a terminé le repas par une glace coconut/crème brûlé (selon les sensibilités) - l'occasion pour moi d'exprimer à la face du monde l'amour que je porte aux crèmes glacées américaines, démesurément crémeuses et sucrées.